Du pin pour faire du pain.
Après mon passage à l'école, je vais chez Willy Teyssonneyre. Il est paysan Boulanger. Passée une première carrière de mécano, il a rejoint le GAEC familial à la suite de sa mère, elle même boulangère. Trente ans en arrière, elle a élevé un premier levain encore bichonné aujourd'hui dans son fournil. Son odeur, c'est celle de la famille. Son nez, m'explique Willy est un outil indispensable, mais la connaissance intime des odeurs de son métier fait que quand tout va bien, il ne sent pour ainsi dire rien. C'est ce qui diffère de cet environnement olfactif familier qu'il pourra détecter. Un signe qu'il faudra interpréter et auquel il faudra éventuellement réagir.
Une visite chez Willy Teysonnière, paysan boulanger
Le paysan boulanger me raconte que le levain absorbe les odeurs et les restitue avec force dans les saveurs du pain. Il faut donc être très vigilant notamment dans les matières qui entrent en contact. Il me donne l'exemple du savon . Trouver une référence sans parfum ajouté ni odeur de savon est plutôt compliqué, mais indispensable pour ne pas marquer le goût. Dans l'effluve du pain, il y a donc un peu de celle des mains - propres - et farinées du boulanger. Une évidence qu'il est heureux de rappeler il me semble.
Quand on prélève le levain pour en garnir une pâte, on le fait avec une spatule de plastique. Les bulles éclatent de la portion qui se détache. Sortie du frigo il a une odeur acide et fraiche de bière juste décapsulée.
Autour du fournil, il y a des bûchers volumineux. A tel point que l'on pourrait se demander quand on arrive si l'on n'entre pas plutôt dans un chantier de bois de chauffage. Le four est de fait un élément central, et demande sa ration quotidienne. Du bois de pin, parceque cette essence dégage une énergie douce et constante. Parmi les gestes qui font sentir du paysan boulanger, il y a celui de couper du bois.
Dans son garage, Willy élève une autre sorte de levain, une litière forestière fermentée (lifofer). Réalisée à partir d'humus récolté en forêt et de mélasse, cette préparation fermentée est ensuite diluée pour être épendue dans les champs. Elle permet d'améliorer la vie de leurs sols.
lorsque Willy ouvre le fut qui la contient, une odeur caramélisée de gnôle de prune, très agréable, presque gourmande emplit la pièce ... Dans la pratique du paysan boulanger des complémentarités se dessinent ainsi entre le fournil et les forêts. Les bois parlent à la farine. Les pieds de froment sentent l'humus des arbres.